La sécurité privée aux Etats-Unis : un modèle applicable à la France ?
La sécurité privée aux Etats-Unis a toujours connu un grand succès. La méfiance naturelle et traditionnelle des Américains envers leur pouvoir étatique les pousse à revendiquer leur droit à l’autodéfense, et donc à faire appel à la sécurité privée dans un grand nombre de domaine. On trouve ainsi trois fois plus d’agents de sécurité que de policier aux Etats-Unis.
La France va dans la direction d’une démocratisation de la sécurité. Ainsi, l’on peut se demander si le modèle de sécurité américain est applicable à la France. En suivant la classification de l’universitaire J. F. Pastor, nous pouvons nous demander si le modèle français peut suivre le modèle des États-Unis.
Quadriller la sécurité privée aux Etats-Unis
L’universitaire James F. Pastor quadrille les activités de sécurité selon deux critères :
– L’activité est-elle réalisée sur un espace public ou privée ?
– Est-elle une substitution ou un complément des actions publiques de sécurité ?
On se retrouve alors avec quatre catégories d’activités, certaines exclusives à la sécurité privée américaines, d’autres qui concernent la France, et d’autres encore qui pourraient inspirer cette dernière.
Quand la sécurité privée remplace les forces publiques dans les espaces privés
On trouve tout d’abord le segment « Espace privé/Substitution ». Celui-ci correspond aux locaux d’entreprises, aux sites industriels, aux commerces. La majorité des agents privés des Etats-Unis interviennent sur ces sites. En France, le mouvement se fait progressivement. Les plateformes de réservation d’agents en ligne comme OProtect permettent cette démocratisation et cette normalisation de la sécurité. Les agents pourront donc davantage exercer dans ce contexte.
La rupture : la sécurité privée à la place de la police dans les espaces publics
Le deuxième segment, « Espace public/Substitution », marque une rupture en France et Etats-Unis. Sur ce segment, les agents occupent des fonctions proches de fonctions des forces de police municipale. La législation française ne permet pas une convergence vers ce modèle. En effet ici, les agents occupent des fonctions proches de celles des forces de police municipales. Aux Etats-Unis, une municipalité n’est pas obligée d’employer elle-même ses policiers, elle peut sous-traiter.
Bien que cette mesure soit assez exceptionnelle, quelques exemples illustrent bien ce qui paraît impossible en France. En 1992, la ville de Sussex, New Jersey, a décidé de limoger tous ses policiers en découvrant qu’ils étaient impliqués dans un trafic de stupéfiants. La ville a ainsi remplacé les policiers par des agents privés aux mêmes pouvoirs que leurs prédécesseurs. Cette mesure ne fut que temporaire. Ce qui est plus commun en revanche, c’est l’embauche par les villes d’agents privés pour remplacer un policier en congé, absent, ou lors d’évènements bien particuliers.
L’action complémentaire des agents privés dans les espaces privés aux Etats-Unis
Le segment « Espace privé/Complément » comprend les universités aux Etats-Unis, qui serait l’équivalent de nos lycées en France. Les mesures de sécurité sont en train d’évoluer face aux différentes violences dans les établissements scolaires français. Des agents de sécurité privés pourraient être présents dans ces établissements. Aux Etats-Unis, les agents font office de police locale.
Dans l’espace public, les forces privées viennent en renfort
Dans la catégorie « Espace public/Complément », on trouve les « Business Improvement Districts », les quartiers d’affaires. On trouve quarante de ces quartiers à New York. Le cas du Grand Central Partnership est parlant. Ce BID regroupe 6 000 entreprises pour 7,1 millions de mètres carrés de surface. Le quartier étant soumis à une forte criminalité, ils décidèrent en 1989 de créer une police de trente agents privés. Au bout de deux ans, le taux de criminalité avait chuté de 20%, et au bout de cinq, de 53%. C’est aujourd’hui 83 000 heures de patrouille et plus de 1 600 interventions par an que les agents de cette police effectuent. Ces agents-là sont davantage formés et ont plus d’expérience que les autres.
En France, l’utilisation d’agents privés sur la voie publique est encore soumise à de fortes conditions. À Nice, la ville a essayé de recruter des agents cynophiles pour surveiller certains quartiers à certaines heures de la journée. Cette mesure fut fortement décriée par les syndicats de police locaux. La loi interdit les « milices privées », sauf dans certains cas d’urgence.